La « Journée des Outre-mer », en ouverture du 107ᵉ Congrès des maires, aura une nouvelle fois servi de miroir : celui où les territoires ultramarins reflètent, parfois avec une intensité plus forte, les défis qui touchent l’ensemble du pays. De la montée des eaux aux ravines réunionnaises, de l’activité sismique en Martinique au narcotrafic en Guyane, les élus ont exprimé sans détour leur lassitude face à un État qu’ils jugent trop souvent lointain, voire indifférent. Une parole franche, mais aussi le rappel que ces territoires sont pleinement français et que leur fragilisation menace l’unité nationale tout entière.
Dans un climat marqué par les cyclones dévastateurs, les séismes récurrents ou les conséquences accélérées du changement climatique, les maires polynésiens, réunionnais ou martiniquais ont décrit des réalités où l’urgence est permanente. Tous ont rappelé, parfois avec émotion, que leur population vit les bouleversements climatiques plusieurs années avant l’Hexagone. La résilience, ce mot que l’on agite souvent pour saluer leur courage, devient pour eux un fardeau : on ne peut éternellement applaudir leur capacité à se débrouiller seuls lorsque les moyens manquent.
Mais c’est la question sécuritaire véritable menace contre la cohésion républicaine qui a fait surgir le plus d’inquiétude. Narcotrafic, homicides, violences armées : les chiffres rappelés par les parlementaires Victorin Lurel ou Catherine Conconne parlent d’eux-mêmes. Les Outre-mer, avec 4 % de la population nationale, concentrent une part disproportionnée de la criminalité violente. Là encore, les élus ont insisté : les maires ne peuvent être les seuls remparts, surtout face à des réseaux internationaux. La réponse doit être celle de l’État souverain, seul capable de frapper les filières à la source.
À Paris, certains élus ultramarins ont regretté que la ministre des Outre-mer n’ait pas assisté aux échanges jusqu’au bout. D’autres ont souligné la nécessité de mieux intégrer les problématiques ultramarines dans les débats nationaux. Car c’est bien là le fond du problème : les Outre-mer ne demandent ni compassion ni traitements d’exception, mais d’être pleinement considérés comme des territoires de la République, avec les droits et les moyens correspondants.
En exposant leurs difficultés, les maires ultramarins n’ont pas seulement parlé pour eux-mêmes : ils ont rappelé que ce qui se joue à Saint-Laurent-du-Maroni, à Hao ou à Saint-Denis préfigure souvent ce qui attend l’ensemble du pays. Leur combat pour la sécurité, l’adaptation climatique, le développement économique et la continuité territoriale n’est pas un « sujet ultramarin ». C’est un sujet français. Et la France aurait tort de ne pas entendre ce que ses territoires les plus exposés lui montrent avec autant de force.



