Le Conseil des ministres de la Polynésie française a validé le classement de 574 hectares du lagon sud de Matira en espace naturel protégé de catégorie 1. Cette décision entérine la création de la première réserve lagonaire intégralement sanctuarisée du territoire, où toute activité humaine est désormais interdite.

Déjà approuvé par l’Assemblée de Polynésie le 13 novembre dernier, le projet a franchi cette semaine sa dernière étape réglementaire. Le rāhui instauré au large de la plage de Matira devient ainsi l’un des plus stricts jamais mis en place en Polynésie française. La catégorie 1, prévue par le code de l’environnement local, correspond au plus haut niveau de protection existant, excluant toute forme d’exploitation ou de fréquentation humaine.

La zone protégée s’étend sur environ 7,2 kilomètres de long et 750 mètres de large. Elle couvre à la fois une bande lagonaire de 500 mètres depuis le récif barrière et une extension de 250 mètres côté large, au-delà du récif. Sont désormais proscrits la pêche, la navigation motorisée, la plongée, ainsi que toute activité nautique ou touristique.

Un choix assumé pour préserver un site stratégique

L’objectif affiché est double. Il s’agit d’abord de permettre la régénération des écosystèmes marins, fortement sollicités au fil des années, mais aussi de disposer d’un espace de référence scientifique permettant d’observer l’évolution naturelle du lagon sans pression humaine. Cette décision s’inscrit dans une logique de gestion responsable d’un patrimoine naturel exceptionnel, au cœur de l’attractivité de la « perle du Pacifique ».

À l’origine de ce classement, le programme Bora Biodiv, lancé en 2019 par la commune de Bora Bora en partenariat avec le CRIOBE. Les études menées ont mis en évidence une dégradation progressive du milieu, marquée par une réduction de la taille des poissons, un appauvrissement des populations de bénitiers et d’oursins, ainsi qu’une pression accrue liée à l’intensité des activités touristiques, notamment la pollution sonore générée par les navires.

La décision de créer un rāhui aussi strict est le fruit d’une concertation approfondie conduite entre 2021 et 2022 avec les habitants, les acteurs économiques et les institutions locales. Pour assurer la gestion du site, un comité dédié, le Tomite Poporāhui, a été mis en place. Il regroupe l’ensemble des parties prenantes et sera chargé de veiller au respect du classement, d’accompagner les usagers et de suivre l’état écologique de la zone.

Si quelques dérogations ponctuelles pourront être accordées, notamment pour le passage d’événements traditionnels comme la Hawaiki Nui Va’a, le principe reste celui d’une protection maximale. Le balisage de la réserve et la définition d’un plan de gestion pluriannuel constituent désormais les prochaines étapes de ce dispositif inédit.

Avec cette réserve lagonaire intégrale, la Polynésie française affirme une volonté claire de préserver durablement ses espaces naturels, en conciliant autorité publique, respect des traditions locales et responsabilité environnementale.

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