Des blocs de corail de deux mètres de diamètre, échoués loin à l’intérieur des terres sur l’île d’Anegada, dans les îles Vierges britanniques, viennent d’éclairer un épisode oublié de l’histoire caribéenne : à la fin du XIVe siècle, un tsunami d’une ampleur exceptionnelle aurait frappé l’arc antillais, bien avant les premières chroniques locales.

Des témoins silencieux d’une vague hors norme

À Anegada, les chercheurs de l’Institut de Physique du Globe de Paris ont d’abord cartographié la répartition de ces coraux, figés dans des zones que la mer n’atteint jamais, même lors des tempêtes. Ils ont ensuite prélevé la surface des blocs pour dater leur mort grâce à une méthode uranium thorium, réalisée dans deux laboratoires, en France et à Taïwan.

Les résultats convergent : ces coraux sont morts entre 1381 et 1391, soit il y a près de 650 ans. Selon l’étude publiée dans la revue Geophysical Research Letters, cette fenêtre temporelle, rare par sa précision, permet d’associer ces dépôts à un tsunami majeur, survenu à une époque où aucun récit ne documentait ce type de catastrophe dans la région.

Les scientifiques estiment que la seule explication compatible avec la taille des blocs et leur position est l’impact d’une vague suffisamment puissante pour arracher des coraux vivants au récif et les projeter à des centaines de mètres à l’intérieur des terres. Les modèles de propagation recoupés avec les données géologiques conduisent à privilégier l’hypothèse d’un séisme de magnitude supérieure à 8 comme déclencheur.

L’enjeu dépasse la seule Caraïbe. L’ampleur suggérée par l’étude implique que les vagues ont pu traverser l’Atlantique, ce qui ouvre désormais un nouveau chantier : rechercher, dans des archives côtières en Amérique du Nord, en Europe ou en Afrique, d’éventuelles traces écrites correspondant à cet événement médiéval.

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