Pendant que le président de la République faisait des ronds de jambe et de samba à Salvador de Bahia au Brésil, le président de la Collectivité Territoriale de Guyane défiait Emmanuel Macron lors du 21ème Congrès des Régions de France à Versailles. En conférence de presse mercredi soir, Monsieur Gabriel Serville, a eu des mots très durs. Verbatim…

Et le dirigeant de la Région Guyane d’attaquer…

« On nous dit que lorsqu’une région gagne, c’est la France qui gagne. Mais je voudrais dire aussi que lorsqu’une région perd, c’est la France entière qui perd. […] La Guyane attend depuis au moins 70 ans qu’elle puisse bénéficier d’un cadre statutaire institutionnel qui soit en ligne directe avec ses réalités.

« J’ai donné un ultimatum au président de la République et j’en ai prévenu aujourd’hui mes homologues présidents de Régions. Si au 31 décembre 2025, le président Macron n’arrive pas à nous donner un engagement très fort vis-à-vis de notre territoire, je me réserve le droit de convoquer le Congrès des élus de Guyane pour prendre une résolution qui me permettrait d’aller au niveau de l’ONU demander que la Guyane soit réinscrite sur la liste des territoires à décoloniser.  

« Parce que jusqu’alors la relation que l’on entretien avec Paris, c’est une relation de colonisés, toujours dans cette forme de décolonisation plus ou moins déguisée.

« J’ajoute que dans la Constitution française elle-même, dans son préambule, des dispositions doivent aussi être décolonialisées. »

Fin du propos en terre de colons, donc ! Du grand wokisme décolonial !

Silence dans la salle parmi les présidents de régions et les journalistes. Beaucoup de regards ébahis… Mais silence assourdissant !

Bakou a dû applaudir

Ces mots sont durs et dévoilent clairement l’idéologie du président Serville dont le parti, Péyi Guyane, est afiilié à l’ancienne NUPES – LFI.

Gabriel Serville a le mérite de la franchise : en Guyane, comme aux Antilles, les Français qui y vivent seraient encore des colonisés. Cette posture victimaire mémorielle réécrit l’histoire, plombe le présent (on préfère se plaindre de Paris que de miser sur le développement économique et culturel) et compromet l’avenir !

Entre Cayenne et Paris, le dialogue tourne au face à face, bientôt au bras de fer.

Bakou doit applaudir !

Car l’Azerbzaidjan assénait les mêmes attaques que Monsieur Serville lors de la Rencontre de Bakou en 2024 en instruisant le procès en décolonisation de la France au sein du mouvement des non-alignés, et en présence, à l’époque, des députés indépendantistes martiniquais Marcellin Nadeau, et guyanais Jean-Victor Castor.

Bakou compte-t-il un nouvel allié de poids en la personne du président de la Collectivité Territoriale de Guyane ? De quoi déstabiliser un peu plus la France, contre l’avis et les besoins des Français des Outre-mer.

La faute à Macron

Au lieu d’avoir circonscrit les enjeux d’autonomie des territoires français aux seules Corse et Nouvelle-Calédonie, parce que leurs histoires respectives et leurs réalités son si singulières, Emmanuel Macron, fortement aidé pendant huit mois par un Manuel Valls aux relents socialistes, a entretenu les revendications autonomistes et indépendantistes dans les Outre-mer.

Lors d’un fameux dîner à l’Élysée le 30 septembre dernier, Macron avait promis aux élus des Caraïbes françaises un nouveau round d’autonomie pour les Outre-mer qui le demanderaient.

La boîte de Pandore est donc ouverte !

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La course aux abymes

Mais que se passe-t-il donc chez les élus de Guyane et de Martinique ?

Ni Serge Letchimy, empêtré dans des affaires judiciaires et une gestion catastrophique de la CTM, ni Gabriel Serville n’ont de mandat de leur population pour pousser si loin cette stratégie institutionnelle. Ils trahissent l’attachement des Guyanais et des Martiniquais à la France qui veulent surtout des réponses à leurs besoins quotidiens (pouvoir d’achat, emploi, développement…).

Coïncidence ou effet d’autoritarisme local ? Il y a quinze ans, ces deux territoires ont fusionné et dissous leurs départements en Collectivités territoriales uniques. Résultat : quinze ans après, et au passage quelques émeutes et voyages à Bakou d’élus indépendantistes plus tard, ces deux mêmes territoires réclament encore plus d’autonomie ! Comme le pensait Tocqueville, les institutions façonnent les hommes. Elles peuvent aussi les pervertir.

Il est loin, le temps de Gaston Monnerville, ce grand Guyanais qui présida le Sénat pendant plus de vingt ans et qui incarnait la République dans toute sa dignité. Monnerville, lui, ne voyait pas la Guyane comme une colonie, mais comme une part entière de la nation française, à égalité de droits et de devoirs. Il croyait à l’émancipation par l’éducation, la responsabilité et la République, non à la victimisation permanente. Là où Serville brandit la menace de l’ONU, Monnerville aurait brandi le drapeau tricolore, convaincu que l’avenir de la Guyane se construisait avec la France, pas contre elle. L’un de ses successeurs, Gérard Larcher, présent hier au Congrès des Régions, pourra réfléchir à quelle Guyane il préfèrerait pour la République et pour les Guyanais, celle de Monnerville ou celle de Serville…

Nos dirigeants politiques nationaux ont-ils conscience de ce qui se trame en profondeur dans les Outre-mer ? Ou feignent-ils de l’ignorer en regardant ailleurs – d’où le silence des présidents de Régions devant les propos de leur homologue de Guyane ?

En fait, sous couvert de décentralisation voire même de fédéralisme, – réforme de l’Etat que nous souhaitons nous-mêmes pour la France), la décentralisation selon les élus d’extrême-gauche ultra-marins, comme Monsieur Serville, c’est l’autonomie totale, la rupture avec la France et souvent l’indépendance.

Il est grand temps qu’une parole forte s’élève à Paris comme dans les capitales ultra-marines : oui à la décentralisation dans les Outre-mer, mais non à la dislocation de la France ! Ce n’est pas seulement l’auteur de ces lignes qui le demande, c’est l’immense majorité des Ultra-marins eux-mêmes qui savent mieux que tout autre ce qu’ils ont à perdre dans ces aventures autonomistes et indépendantistes.

Autonomie, vraiment ? Non, rupture en Martinique selon Serge Letchimy, et décolonisation assumée en Guyane.

Messieurs Serville et Letchimy, soyez honnêtes : décoloniser les territoires, cela veut dire quitter la France, à peut-être brève échéance !

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