La Guyane affiche un paradoxe inquiétant : la consommation globale de drogues y reste légèrement inférieure à celle observée dans l’Hexagone, mais l’offre est massive, bon marché et de plus en plus diversifiée. L’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) met en garde : le territoire est désormais une zone de transit stratégique du trafic international de cocaïne, avec des retombées locales dévastatrices.
Le crack, sous forme de « cailloux » immédiatement consommables, circule à bas prix à Cayenne où l’on recense près d’une vingtaine de points de deal. Le Suriname alimente quant à lui un marché grandissant de MDMA et d’ecstasy, notamment sous une forme liquide surnommée « Pikachu », très prisée par certains adolescents de l’ouest guyanais. Plusieurs cas d’hospitalisations graves ont déjà été signalés, illustrant la dangerosité de ces nouvelles drogues de synthèse.
Si l’usage reste relativement limité, les conséquences sociales et sanitaires sont alarmantes. Les structures de soin spécialisées sont débordées : manque de personnel, turn-over incessant, moyens insuffisants. Les associations locales, en première ligne, peinent à compenser ces faiblesses institutionnelles. Pour beaucoup de professionnels, l’explosion de l’offre pourrait bientôt se traduire par une hausse massive de la consommation.
Face à cette situation, le président de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues (Mildeca), Nicolas Prisse, en déplacement à Cayenne, a signé une convention avec la Communauté d’agglomération du centre littoral. Objectif : empêcher l’entrée des jeunes dans les réseaux de trafic. Mais une évidence s’impose : sans renfort de l’État et sans un sursaut collectif, la Guyane risque de devenir une base avancée des cartels sud-américains aux portes de la République.