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Le centre-ville de Fort-de-France vit des heures difficiles.

Jadis vitrine commerçante de la Martinique, il se présente aujourd’hui sous un visage dégradé, marqué par les fermetures de magasins, la saleté des rues et un sentiment d’insécurité croissant. Pour beaucoup de visiteurs, l’expérience vire à la déception : détritus, rongeurs, façades délabrées et vitrines fermées ont remplacé l’image pimpante de la « Ville-capitale ».

Le commerce, qui faisait autrefois battre le cœur du centre, s’étiole. Les mercredis et samedis de foule appartiennent au passé, et la disparition d’enseignes emblématiques comme Forum Caraïbe ou Doum 2000 a porté un coup supplémentaire. La rue Victor-Hugo, autrefois prestigieuse, n’est plus que l’ombre d’elle-même. Les commerçants parlent d’une situation critique, aggravée par les tensions sociales qui ont secoué l’île récemment.

Les raisons de ce déclin sont multiples. Les familles aisées ont déserté le centre au profit de quartiers plus résidentiels. L’accessibilité est devenue un casse-tête, entre parkings chers et transports aléatoires. L’espace urbain, peu adapté et mal protégé contre la pluie ou la chaleur, n’incite guère à la flânerie. La concurrence des zones commerciales périphériques et du commerce en ligne siphonne la clientèle, tandis que l’insécurité, réelle ou perçue, finit de dissuader les visiteurs, surtout à la tombée de la nuit. Beaucoup de commerçants se sentent abandonnés par les autorités, incapables d’enrayer cette spirale.

Pourtant, tout n’est pas perdu. Des signes de renouveau apparaissent. De nouveaux établissements tentent de redonner vie à certaines rues, notamment Lamartine et Victor-Hugo. La vie nocturne s’affirme, portée par des lieux prisés comme la Rue Colorée, le Yunu, le Rooftop ou le Boa Rosa. Quelques jeunes choisissent même de revenir habiter le centre. Des projets municipaux de réaménagement sont en cours, visant à transformer le cadre urbain et à préparer un nouveau cycle.

La Cour-Perrinon illustre bien cette transition : les fermetures d’enseignes phares comme Cultura ou Carrefour Market cohabitent avec l’arrivée de services médicaux et sportifs. La ville ne meurt pas, elle se réinvente. Fort-de-France garde des atouts majeurs : un patrimoine architectural unique, une situation géographique stratégique et une identité culturelle forte.

Reste à savoir si le tempo des transformations sera assez rapide pour inverser la tendance. La métamorphose est possible, mais elle exigera coordination, audace et investissements. Sans cela, le risque est grand que le déclin, déjà bien entamé, finisse par s’installer durablement.

Photo : Scott S Bateman / Wikimédia (CC BY-SA 4.0)


Patrice Clech

Journaliste et analyste, il consacre ses travaux aux dynamiques politiques, sociales et culturelles des Outre-mer, qu’il explore avec rigueur et passion.

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