Une vaste étude scientifique menée en Nouvelle-Calédonie met en lumière une réalité longtemps sous-estimée : la population kanak présente une prédisposition génétique accrue à la goutte, une maladie chronique particulièrement répandue sur le territoire. En cause, la variante génétique ABCG2, identifiée chez de nombreuses personnes d’Océanie et désormais clairement détectée chez les Kanak, indépendamment des habitudes alimentaires souvent mises en accusation de manière simpliste.
Baptisée CaledogoutCKD, cette recherche, conduite auprès de près de 1 800 participants issus des îles Loyauté et de la Grande Terre, démontre que la santé publique ne peut être pensée uniquement sous l’angle du mode de vie ou des discours culpabilisants. La génétique joue ici un rôle central, ce qui impose une approche médicale rigoureuse, fondée sur la science et non sur les clichés culturels ou communautaires.
L’étude apporte toutefois une nuance majeure, trop peu relayée dans le débat public : une autre variante génétique, ANGPTL, relativement fréquente chez les Kanak, semble offrir une protection contre le cholestérol. Une singularité prometteuse, qui ouvre la voie à des avancées thérapeutiques et confirme que les Outre-mer constituent aussi des territoires de recherche et d’innovation médicale à forte valeur ajoutée pour l’ensemble de la France.
Autre enseignement clé : contrairement à certaines populations autochtones dans le monde, les Kanak ne présentent pas de contre-indication génétique aux traitements standards contre la goutte. Autrement dit, l’accès aux soins efficaces existe bel et bien ; encore faut-il que les politiques de santé soient adaptées, structurées et pleinement assumées par les autorités, sans tomber dans la tentation du fatalisme ou de la victimisation.
Cette étude rappelle enfin une évidence trop souvent oubliée : les enjeux sanitaires ultramarins ne sont ni marginaux ni anecdotiques. Ils appellent des réponses nationales ambitieuses, fondées sur la connaissance, la prévention et la responsabilité individuelle comme collective. La République ne protège efficacement que lorsqu’elle comprend, anticipe et agit, au service de tous ses citoyens, sans distinction.



