Alors que les motions de censure déposées par La France insoumise et le Rassemblement national ont échoué de peu à renverser le gouvernement de Sébastien Lecornu, la Guadeloupe a offert un visage contrasté de son expression politique. Les députés de l’archipel ont affiché des lignes divergentes, reflet d’un territoire où les fractures sociales et économiques demeurent profondes.
Le vote des députés guadeloupéens
En Guadeloupe, les socialistes se divisent, tandis qu’Olivier Serva, député indépendant souvent critique du pouvoir, a choisi le camp de la censure :
Olivier Serva (Liot – 1ʳᵉ circonscription) : a voté pour la censure.
Christian Baptiste (PS – 2ᵉ circonscription) : a voté pour la censure.
Max Mathiasin (Liot – 3ᵉ circonscription) : n’a pas voté la censure.
Élie Califer (PS – 4ᵉ circonscription) : n’a pas voté la censure, affirmant vouloir « laisser une chance au gouvernement ».
Une fracture politique qui traduit un malaise économique
Ces divergences traduisent moins des querelles partisanes que la lassitude d’un territoire confronté à la flambée des prix. En Guadeloupe, l’alimentation coûte en moyenne 30 à 40 % plus cher que dans l’Hexagone, une réalité amplifiée par la dépendance aux importations et par des coûts de transport en constante hausse.
Pourtant, le gouvernement envisage de relancer un projet de loi « contre la vie chère » directement inspiré du dispositif présenté en 2012 par Manuel Valls. Ce texte, fondé sur le contrôle administratif des prix et la surveillance renforcée des marges, inquiète les acteurs économiques locaux. Beaucoup y voient un retour à une économie administrée, contraire à la logique de compétitivité dont les petites entreprises guadeloupéennes ont besoin pour se développer.
Le risque d’un modèle figé
Les représentants du patronat et des chambres consulaires rappellent que les surcoûts structurels – transport, énergie, insularité – ne peuvent être effacés par décret. En voulant imposer des prix artificiellement bas, l’État risque de fragiliser les filières locales, déjà contraintes par un marché restreint.
« Ce n’est pas en fixant les prix qu’on lutte contre la vie chère, c’est en investissant dans la logistique, l’énergie et la production locale », estime un acteur du commerce de gros guadeloupéen.
Une alternative : la continuité économique réelle
Plutôt que de maintenir les Outre-mer dans un modèle de dépendance budgétaire, plusieurs élus loyalistes plaident pour une continuité économique territoriale inscrite dans la loi. L’idée : compenser structurellement les surcoûts liés à l’éloignement, comme cela existe déjà pour la Corse, tout en encourageant la production locale et les circuits courts.
En Guadeloupe, la fracture politique reflète une même exigence : que la République cesse de traiter l’archipel comme un marché sous tutelle. L’enjeu n’est pas de plafonner les prix, mais de garantir l’égalité réelle par l’investissement et la confiance.