Le tribunal administratif de la Guyane a annulé l’autorisation préfectorale accordée à la compagnie minière Phoenix pour exploiter un site aurifère sur la crique Citron, à Grand-Santi. Saisi par l’association Guyane nature environnement (GNE), le juge a estimé que le projet, situé en zone naturelle d’intérêt écologique (ZNIEFF), aurait dû faire l’objet d’une évaluation environnementale complète et non d’une simple notice d’impact, jugée insuffisante au regard des atteintes potentielles à la faune, à la flore et aux cours d’eau.
Sur le plan juridique, la décision s’appuie sur le droit applicable avant la réforme du code minier de 2024. Le tribunal reproche notamment l’absence d’inventaire des espèces protégées et l’inexistence de demande de dérogation spécifique, alors même que les travaux prévoyaient déforestation, creusement et dérivation d’un cours d’eau. L’arrêté préfectoral de 2022, ainsi que le refus implicite ultérieur d’exiger un dossier plus complet, ont donc été jugés illégaux.
Mais au-delà du strict raisonnement juridique, cette affaire met en lumière une contradiction de fond qui traverse la Guyane depuis des années. En annulant une exploitation légale, encadrée et contrôlée, la décision nourrit la colère des opérateurs miniers déclarés. La Fédération des opérateurs miniers de Guyane dénonce un effet pervers : chaque projet légal bloqué laisse le terrain libre aux orpailleurs clandestins, qui ravagent les criques sans autorisation, sans étude et sans contrôle, au détriment de l’environnement et de la sécurité.
Ce dossier illustre une réalité que beaucoup refusent de regarder en face : la protection de la nature ne peut pas se limiter à des batailles procédurales contre les acteurs déclarés, pendant que l’orpaillage illégal prospère en toute impunité. En Guyane, l’écologie ne peut être efficace que si elle s’inscrit dans une stratégie globale de souveraineté, de lutte contre les clandestins et de soutien à une filière légale exigeante. Faute de quoi, les décisions de justice, aussi fondées soient-elles en droit, risquent d’aboutir à l’exact inverse de l’objectif affiché.



