Le constat est préoccupant : selon le Conseil d’administration du Parc amazonien de Guyane, réuni le 25 novembre, l’orpaillage clandestin connaît une recrudescence inédite depuis 2017. Les survols héliportés réalisés en juillet ont identifié 176 sites illégaux actifs, soit presque autant qu’au pic historique de 2017. Après une brève accalmie en février, la pression exercée par les garimpeiros repart nettement à la hausse, notamment sous l’effet du prix de l’or et de l’implantation de comptoirs étrangers sur le Maroni.
Le phénomène touche l’ensemble du Parc, mais Maripasoula demeure l’épicentre de l’activité clandestine avec plus de 112 sites recensés. Les orpailleurs, mieux organisés, détournent désormais les contrôles fluviaux en développant des voies logistiques terrestres. À Papaïchton, la dégradation atteint des niveaux alarmants : certains cours d’eau, comme à Saint-Jean Abounami, sont considérés comme irréversiblement abîmés.
Des élus de l’intérieur sous pression
Face à l’ampleur du phénomène, les maires du Haut-Maroni tirent la sonnette d’alarme. Jules Deïe, maire de Papaïchton et président du Conseil d’administration du Parc, décrit un combat permanent : malgré les destructions de matériel, les réseaux criminels disposent de moyens considérables et reviennent systématiquement. À Camopi, où l’activité semble stable à 16 sites, le maire Laurent Yawalou dénonce une situation trompeuse : pollution de l’eau, risques sanitaires, atteintes à la biodiversité et blocage total du développement économique local.
Tous s’accordent sur un point : tant que l’orpaillage illégal prospérera, aucun véritable projet économique ne pourra émerger dans les communes de l’intérieur. L’impact est humain, écologique, mais aussi territorial, puisque la Guyane voit ses ressources pillées par des groupes criminels transfrontaliers.
Vers un effort diplomatique renforcé
Si les opérations Harpie et l’engagement de l’État sur le terrain sont salués, le Parc amazonien et les élus appellent désormais à « changer de stratégie ». Le Suriname et le Brésil, où se situent les principales bases arrière des garimpeiros, sont au cœur du problème. La ministre de la Transition écologique, Monique Barbut, en déplacement en Guyane, a confirmé réfléchir à des actions juridiques contre les États voisins lorsque leur laxisme favorise des atteintes environnementales majeures sur le territoire français.
La Cour des comptes, dans un rapport publié début 2025, rappelait par ailleurs la singularité du Parc amazonien de Guyane, seul parc national à consacrer une part importante de ses effectifs à la lutte contre l’orpaillage clandestin. Une coopération diplomatique et sécuritaire renforcée est jugée indispensable pour protéger durablement les populations du Maroni et du Haut-Oyapock.



