L’appel national à « tout bloquer » a trouvé un écho mitigé à La Réunion, mais la journée du 10 septembre a tout de même rassemblé près de 900 personnes sur l’ensemble du département. À Saint-Denis comme à Saint-Pierre, les deux principaux pôles de mobilisation, plusieurs centaines de manifestants ont répondu présent, encadrés par un important dispositif de sécurité déployant plus de 600 policiers et gendarmes.

Si la matinée s’est déroulée dans un climat globalement calme, la situation s’est tendue en milieu de journée. À Saint-Denis, une déambulation non déclarée a perturbé la circulation au Barachois, obligeant les forces de l’ordre à disperser le cortège. Les slogans hostiles au gouvernement et les « Macron démission » ont résonné jusque sur le boulevard Lancastel, mais la mobilisation a fini par se disperser faute de véritable direction. À Saint-Pierre, des syndicats comme la CGTR, FO ou Solidaires ont rappelé leurs revendications, dénonçant la remise en cause de droits sociaux et appelant à poursuivre la lutte malgré une participation jugée décevante par certains responsables.

La mobilisation a également pris des formes plus ponctuelles ailleurs sur l’île : distribution de tracts à Savannah, rassemblements devant des sous-préfectures ou filtrage de zones commerciales. Les syndicats insistaient sur la nécessité de rappeler leurs inquiétudes face à la politique gouvernementale, tout en constatant une certaine lassitude parmi la population, marquée par les souvenirs de 2018 et des gilets jaunes.

En marge des cortèges, sept personnes ont été interpellées. Parmi elles, des mineurs surpris en possession d’un poing américain ou pris en flagrant délit de graffitis, ainsi que d’autres pour des faits d’entrave ou de dégradations. Ces incidents n’ont pas dégénéré en affrontements massifs, mais traduisent la tension qui a traversé cette journée d’action.

Au final, le mouvement n’a pas paralysé l’île. Aucun blocage durable des routes n’a été constaté et la circulation est revenue rapidement à la normale. Mais cette journée aura montré une détermination persistante chez une frange militante, bien décidée à maintenir la pression contre ce qu’elle qualifie de « casse sociale ». Reste à voir si cette mobilisation, modeste dans son ampleur mais visible dans son expression, ouvrira la voie à d’autres actions dans les semaines à venir.


Patrice Clech

Journaliste et analyste, il consacre ses travaux aux dynamiques politiques, sociales et culturelles des Outre-mer, qu’il explore avec rigueur et passion.

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