Après avoir survécu de justesse à deux motions de censure, le gouvernement de Sébastien Lecornu fait face à un nouveau front politique : celui des élus d’Outre-mer. En cause, le projet de loi de finances 2026, qui prévoit une baisse significative des aides aux entreprises et des crédits alloués à la mission Outre-mer.
Les parlementaires ultramarins, toutes sensibilités confondues, dénoncent une politique budgétaire jugée déconnectée des réalités économiques et sociales de leurs territoires. « Il n’y a plus de marge : certains territoires manquent d’eau, d’autres de logements ou de routes. Et on nous demande encore de contribuer à l’effort budgétaire national », s’indigne la députée réunionnaise Émeline K/Bidi. « Nous refusons ces coupes. »
Fronde ultramarine dans un débat budgétaire à haut risque
Alors que la majorité socialiste métropolitaine a choisi de ne pas renverser le gouvernement, plusieurs députés d’Outre-mer ont pris le contrepied. Les élus de Guadeloupe, de Martinique et de La Réunion ont adressé un courrier à Matignon pour alerter sur les conséquences des réductions prévues dans le budget 2026.
Face à la fronde, Sébastien Lecornu a reconnu que la « copie budgétaire pour les Outre-mer était imparfaite » et a promis une révision. Les parlementaires seront reçus dans les prochains jours par la ministre des Outre-mer, Naïma Moutchou, et la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin. Le Guadeloupéen Elie Califer a préféré accorder un sursis au gouvernement : « Le courrier du Premier ministre engage sa parole. Nous jugerons sur actes. »
Au sein du groupe LIOT, certains élus, comme Stéphane Lenormand à Saint-Pierre-et-Miquelon, ont choisi la voie du pragmatisme. « Si j’avais écouté mon cœur, j’aurais voté la censure », admet-il. « Mais faire tomber le gouvernement aurait ajouté du chaos à la crise. Nous voulons désormais un budget plus juste, qui protège les plus modestes et soutienne l’investissement outre-mer. »
D’autres, à l’image du député Olivier Serva, estiment que seule une pression politique forte permettra d’obtenir des garanties concrètes.
L’examen du budget débutera dans les prochains jours à l’Assemblée nationale. Sans 49.3, le gouvernement devra convaincre, amendement après amendement. Les députés ultramarins promettent de faire entendre leur voix.
« On verra qui agit vraiment pour les Outre-mer et qui se contente d’en parler », prévient Max Mathiasin, député de Guadeloupe.
Un enjeu de cohésion nationale
Derrière les chiffres et les arbitrages comptables, le débat sur le budget 2026 prend une tournure politique et symbolique : celle du lien entre la Nation et ses territoires ultramarins. Les coupes envisagées, même partielles, sont perçues comme un signal de désengagement.
Dans un contexte de fragilité économique, les élus loyalistes rappellent que le soutien à l’investissement public dans les Outre-mer n’est pas un privilège, mais une nécessité pour garantir l’unité de la République.