Des milliards de tonnes de plastique ont été produits depuis 1950, avec plus de 400 millions de tonnes supplémentaires chaque année. Une partie finit en mer : environ 14 millions de tonnes de déchets plastiques rejoignent l’océan chaque année, portant le stock océanique à plus de 260 millions de tonnes. Moins de 9 % du plastique mondial est recyclé. Résultat : des gyres saturés de débris, des côtes souillées de l’Atlantique au Pacifique, et des microplastiques désormais détectés jusqu’aux pôles.

Un risque sanitaire et économique concret

Dans l’océan Indien, des analyses récentes autour de La Réunion confirment une contamination par des microplastiques parfois colonisés par des bactéries résistantes aux antibiotiques. Ces particules, issues de la fragmentation des déchets, voyagent au gré des courants et s’accumulent sur nos rivages. Elles menacent directement la faune protégée : ingestion par les tortues marines, étouffement des oiseaux, enchevêtrement des mammifères marins.

Les récifs coralliens de Polynésie, de Nouvelle-Calédonie ou des Antilles subissent un double stress: chimique (additifs, microfibres) et biologique, avec la possibilité de transporter des organismes opportunistes et pathogènes. À terme, c’est la pêche artisanale, le tourisme littoral et l’image même de nos îles qui sont touchés.

Le cœur du problème est connu : une production massive, des filières de collecte incomplètes et, dans plusieurs pays voisins, l’absence de systèmes de gestion des déchets. Les fleuves charriant des plastiques vers la mer, les activités maritimes (pêche, transport) et l’essor du jetable alimentent la pollution. En mer, les débris se fragmentent sans disparaître, formant une « soupe » de microplastiques que la faune ne distingue pas toujours de sa nourriture. Les gyres du Pacifique et de l’Atlantique concentrent ces flux, mais aucun bassin ultramarin n’est épargné.

Comment protéger nos espaces maritimes ?

La réponse doit être d’abord locale et concrète. Priorités : empêcher l’entrée du plastique dans l’environnement (collecte, tri, lutte contre les dépôts sauvages), cibler les usages réellement évitables (emballages à usage unique), sécuriser les filières portuaires et de pêche (filets, flotteurs, cordages), et renforcer le nettoyage des zones sensibles (mangroves de Guyane, herbiers antillais, récifs polynésiens et calédoniens). Côté santé publique, la surveillance des plages, des prises halieutiques et des eaux de baignade doit intégrer un volet microplastiques et contaminants associés.

Enfin, nos territoires doivent peser dans les négociations internationales pour tarir la source. Sans réduction mesurable de la production mondiale et sans obligation de responsabilité élargie des producteurs, les efforts locaux resteront un combat à la rame contre un flot permanent. Protéger tortues, coraux et pêcheries, c’est protéger notre économie, notre sécurité alimentaire et notre souveraineté maritime.

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