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La Martinique s’est distinguée par une unité rare lors du vote des motions de censure du 16 octobre. Alors que l’Assemblée nationale a rejeté de justesse les textes déposés par La France insoumise et le Rassemblement national, les députés martiniquais ont tous voté pour la censure du gouvernement Lecornu. Une position commune qui traduit autant une fidélité à la gauche qu’un profond désaccord avec la politique économique du moment.

Le vote des députés martiniquais

En Martinique, l’unité de la gauche s’est manifestée sans faille :

Jiovanny William (PS – 1ʳᵉ circonscription) : pour la censure.

Marcellin Nadeau (GDR – 2ᵉ circonscription) : pour la censure.

Béatrice Bellay (PS – 3ᵉ circonscription) : pour la censure.

Jean-Philippe Nilor (LFI – 4ᵉ circonscription) : pour la censure.

Une contestation politique, mais aussi économique

Le vote unanime des élus martiniquais dépasse les clivages habituels : il illustre la perte de confiance envers la politique économique du gouvernement, accusée de reproduire des modèles dépassés.

Parmi eux, la volonté de relancer une “loi contre la vie chère” dans la lignée du texte porté par Manuel Valls en 2012. Or, cette orientation – que l’exécutif présente comme un acte de justice sociale – repose sur une logique de contrôle administratif des prix, héritée de la planification économique, loin des réalités du marché insulaire.

En Martinique, les prix à la consommation demeurent parmi les plus élevés de France. En 2025, l’inflation alimentaire a atteint +3 % sur un an, contre 1,7 % en métropole. Mais pour les chefs d’entreprise, ces écarts ne sont pas liés à des “abus de marges”, comme le suppose le projet de loi, mais à des surcoûts logistiques structurels : transport maritime, stockage, dépendance énergétique et faibles volumes d’importation.

Chercher à plafonner les prix sans compenser ces coûts revient, selon eux, à “casser le thermomètre plutôt qu’à soigner la fièvre”.

Les limites d’une économie administrée

Les mesures de contrôle de marges, les sanctions financières et l’élargissement des pouvoirs de l’Autorité de la concurrence inquiètent les acteurs économiques martiniquais. Ils y voient une politique de défiance envers le secteur privé, perçue comme punitive et contre-productive.
“Ce type de loi fragilise les commerçants, dissuade l’investissement et ne fait qu’accentuer la dépendance économique vis-à-vis de l’État”, résume un économiste local.

Vers une réforme structurelle, pas réglementaire

Les observateurs loyalistes plaident plutôt pour une approche structurelle : une refonte de la fiscalité locale (notamment de l’octroi de mer) ; la mise en place d’un véritable mécanisme de continuité économique territoriale pour compenser les surcoûts liés à l’éloignement ; et un plan de soutien à la production locale.

En Martinique, cette unité politique assez inédite sur la censure traduit une fatigue économique partagée. La solution n’est pas de fixer les prix depuis Paris, mais de permettre à l’île de produire, investir et exporter dans des conditions équitables. L’économie administrée n’a jamais fait baisser durablement la vie chère, elle l’a rendue chronique.

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