Les mots sont tombés comme un couperet. Auditionnée au Sénat, la ministre des Outre-mer Naïma Moutchou a définitivement rangé au rayon des illusions le projet de nouvelle prison à Nouméa, pourtant annoncé à plusieurs reprises par ses prédécesseurs. Face à la surpopulation dramatique du Camp-Est, elle a choisi la franchise : « On n’a pas cet argent et on n’a pas ce temps. » Un constat brutal, mais enfin lucide, tant la promesse d’un établissement flambant neuf relevait davantage du symbole politique que d’un plan opérationnel.

Car le Camp-Est demeure l’une des urgences pénitentiaires les plus criantes de France : 600 détenus pour 414 places, des cellules vétustes et une insalubrité régulièrement condamnée. La ministre ne nie rien : elle s’y est rendue, elle a vu, elle assume. Mais elle rappelle aussi une vérité budgétaire incontournable : la prison annoncée coûterait au minimum 500 millions d’euros probablement bien davantage et nécessiterait près d’une décennie de travaux, un délai intenable au vu de la pression actuelle.

Loin des postures idéologiques, Naïma Moutchou défend donc un virage pragmatique : créer un centre de semi-liberté pour désengorger immédiatement le Camp-Est, concentrer les moyens sur la réinsertion des profils adaptés, et cesser de « poursuivre un doux rêve ». Un choix qu’elle compte soumettre au garde des Sceaux. Ce recentrage sur les solutions concrètes contraste avec les grands discours déconnectés que certains leaders locaux agitent, au détriment de la sécurité des Calédoniens et de la continuité républicaine.

Dans un territoire affaibli par les violences de 2024 et engagé dans une reconstruction difficile, la priorité n’est plus aux annonces grandioses, mais à la restauration de l’ordre, du service public et de la confiance. En assumant ce changement de cap, le gouvernement envoie un signal clair : la Nouvelle-Calédonie reste pleinement dans la République, mais elle doit s’appuyer sur des solutions réalistes, adaptées au terrain, et non sur des promesses intenables qui nourrissent frustrations et défiances.

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