Malgré un danger mortel désormais avéré, la campagne de rappel des airbags Takata peine toujours à produire ses effets en Nouvelle-Calédonie. Sur les 14 000 véhicules concernés, près de 7 000 circulent encore avec des dispositifs potentiellement explosifs, dans un contexte réglementaire insuffisamment contraignant.
Les airbags défectueux de la marque japonaise Takata constituent l’un des plus graves scandales industriels de ces dernières décennies. En France, ils sont impliqués dans au moins 19 décès, dont 17 survenus en Outre-mer, où la chaleur et l’humidité accélèrent leur dégradation. En Nouvelle-Calédonie, sur un parc d’environ 200 000 véhicules, 14 000 sont concernés par un rappel constructeur, mais seule la moitié des propriétaires a fait procéder au remplacement.
Pourtant, l’opération est simple, rapide et gratuite. Le changement de deux airbags nécessite à peine quinze minutes chez un concessionnaire agréé. Les professionnels du secteur affirment être mobilisés depuis plusieurs années, multipliant courriers et campagnes d’information, souvent sans réponse.
Une responsabilité collective face à un risque mortel
Les autorités calédoniennes rappellent régulièrement l’urgence de la situation. En octobre dernier, une enquête judiciaire a confirmé qu’un airbag Takata était à l’origine du décès d’un père de famille à Maré, relançant brutalement l’alerte. À chaque drame, les concessionnaires voient affluer les appels, avant que la mobilisation ne retombe rapidement.
À la différence de l’Hexagone et des départements d’Outre-mer, où l’État a imposé depuis avril 2025 un cadre strict aux constructeurs et distributeurs, la Nouvelle-Calédonie ne dispose pas de dispositif réglementaire équivalent. Aucune obligation forte n’impose aujourd’hui l’immobilisation des véhicules à risque ni la prise en charge systématique du remorquage ou du prêt de véhicule.
Dans les faits, certains automobilistes se voient encore conseiller de faire appel à un dépanneur à leurs frais, ce qui dissuade nombre d’entre eux. Résultat : des véhicules dangereux continuent de circuler quotidiennement, exposant conducteurs et passagers à un risque immédiat.
Ailleurs en Outre-mer, des solutions plus volontaristes émergent. En Martinique, où 2 800 véhicules restent identifiés comme à risque, des unités mobiles de remplacement ont été mises en place pour accélérer la campagne. Aux Antilles, les premiers rappels remontent à 2018, preuve que la durée n’est plus une excuse.
Ce dossier met en lumière un enjeu fondamental : la capacité des autorités publiques à protéger concrètement les citoyens face à des risques industriels connus. En Nouvelle-Calédonie, l’absence de cadre contraignant interroge, alors même que la sécurité routière et la protection des vies humaines devraient relever d’une priorité absolue de l’action publique.



