En Nouvelle-Calédonie, les exploitants de nakamal viennent de franchir un cap politique en annonçant la création de la Fédération des artisans du kava. Cette structuration intervient alors qu’un projet de loi du pays, porté par le gouvernement local, vise à encadrer plus strictement la vente et la consommation de kava. Transmis récemment au Congrès, le texte suscite de vives inquiétudes parmi les professionnels du secteur, qui dénoncent une méthode jugée brutale et déconnectée des réalités économiques.

Les exploitants pointent notamment le risque d’un numerus clausus pouvant entraîner la fermeture de nombreux établissements, l’absence d’étude d’impact sérieuse et une assimilation du kava au régime de l’alcool, perçue comme culturellement et scientifiquement contestable. Ils regrettent surtout une démarche conduite sans concertation préalable, alors même que le kava s’inscrit dans des usages traditionnels profondément ancrés dans la société calédonienne.

En se constituant en fédération, les acteurs du secteur entendent désormais peser dans le débat public et réclament une approche plus rationnelle et respectueuse : licence spécifique, période transitoire pour les établissements existants et reconnaissance administrative pleine et entière d’une filière qui, paradoxalement, opère légalement sans cadre clair depuis des années. À travers cette mobilisation, ils demandent moins d’idéologie et plus de pragmatisme.

Ce dossier révèle une fois de plus les dérives d’une gouvernance locale prompte à réglementer sans mesurer les conséquences économiques et sociales. Encadrer n’est pas interdire, et protéger la santé publique ne saurait servir de prétexte à fragiliser une activité culturelle et économique qui participe à la stabilité sociale. Dans les Outre-mer comme ailleurs, la République gagnerait à privilégier la concertation et l’État de droit plutôt que les décisions unilatérales sous pression politique.

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