L’État a officiellement retiré toute autorisation d’exercice au docteur Huidi Tchero, soupçonné d’avoir pratiqué la chirurgie orthopédique pendant plus de dix ans sans disposer du diplôme requis. Si la décision administrative est désormais actée, l’affaire met en lumière de graves défaillances de contrôle et se poursuit sur le plan judiciaire.

Par un arrêté ministériel daté du 24 novembre 2025 et publié au Journal officiel le 18 décembre, le docteur Huidi Tchero a été radié de la liste des praticiens autorisés à exercer en France la spécialité de chirurgie orthopédique et traumatologie. Cette décision met un terme immédiat à son activité médicale, après plus d’une décennie d’exercice au centre hospitalier Louis-Constant Fleming de Saint-Martin.

La mesure, signée par le Centre national de gestion au nom de la ministre de la Santé, fait suite à la confirmation officielle que le praticien ne détenait pas le diplôme de spécialité qu’il revendiquait. Si son diplôme de médecine générale, délivré par une université de Guinée, est reconnu comme authentique, le titre de chirurgien orthopédiste présenté aux autorités françaises a été formellement identifié comme frauduleux.

Une défaillance prolongée des mécanismes de contrôle

Le docteur Tchero avait été suspendu à titre conservatoire dès la fin du mois d’octobre 2025, à la suite d’une alerte du Conseil départemental de l’Ordre des médecins. Pourtant, des interrogations sur son parcours professionnel avaient déjà émergé à plusieurs reprises au cours des années précédentes, notamment en 2012 et en 2018, sans jamais déboucher sur une remise en cause effective de son autorisation d’exercer.

En 2016, les diplômes transmis avaient même été validés par les instances ordinales nationales, illustrant une chaîne de vérification manifestement défaillante. Ce n’est qu’après la réception, en octobre 2025, d’une attestation officielle de l’université de Guinée-Conakry que le caractère frauduleux du diplôme de spécialité a pu être établi sans ambiguïté.

Une procédure judiciaire aux enjeux majeurs

Parallèlement à la décision administrative, une information judiciaire a été ouverte par le parquet de Basse-Terre pour des faits susceptibles de relever du pénal, notamment faux et usage de faux. Le praticien demeure présumé innocent à ce stade, mais plusieurs patients se sont déjà manifestés.

Selon la presse locale, une vingtaine de personnes envisagent de déposer plainte, certaines faisant état de séquelles graves après des interventions chirurgicales réalisées à Saint-Martin. À Saint-Barthélemy, où le médecin intervenait dans le cadre d’une convention entre établissements hospitaliers, aucune plainte n’a été signalée à ce jour. Il y assurait uniquement des consultations, les actes opératoires étant centralisés à Saint-Martin.

Une affaire révélatrice des fragilités ultramarines

Cette affaire dépasse largement le cas individuel d’un praticien. Elle met en cause la capacité de l’État et de ses agences à garantir un contrôle rigoureux de l’exercice médical dans les territoires ultramarins, où la pénurie de soignants ne saurait justifier le moindre relâchement des exigences.

La sénatrice de Saint-Martin Annick Pétrus a dénoncé un dysfonctionnement grave de la chaîne de contrôle, rappelant que la sécurité des patients et la crédibilité du service public hospitalier doivent demeurer des priorités absolues.

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