À Moorea comme ailleurs en Polynésie, la prolifération des taramea – ces étoiles de mer épineuses surnommées « couronnes d’épines » – inquiète habitants et scientifiques. Capables de dévorer jusqu’à 6 m² de corail vivant par an, elles laissent derrière elles des récifs blanchis et fragilisés. Depuis trois ans et demi, leur progression a réduit le corail vivant de l’île à moins de 2 %. Pour les Polynésiens, ces prédateurs représentent une véritable armée des profondeurs, ravageant les lagons.

Pour autant, le débat divise la communauté scientifique. Certains chercheurs rappellent que les taramea font partie intégrante de l’écosystème et qu’elles peuvent jouer un rôle dans le renouvellement du récif : quand le corail meurt, de nouvelles larves s’implantent et relancent la colonisation. Mais dans le contexte du changement climatique, marqué par le réchauffement et l’acidification des océans, ces cycles naturels semblent désormais déséquilibrés et bien plus destructeurs qu’autrefois.

Entre éradication et équilibre naturel

Face au danger immédiat, des campagnes d’élimination sont organisées, notamment par injection de vinaigre ou d’acide citrique, une méthode jugée efficace et sans danger pour l’environnement. Les autorités polynésiennes misent aussi sur la mobilisation citoyenne : plongeurs, pêcheurs et habitants sont encouragés à signaler et éliminer ces étoiles de mer. Parallèlement, les scientifiques rappellent le rôle crucial des prédateurs naturels – comme le grand triton ou certains poissons – dont la raréfaction accentue le déséquilibre.

L’histoire récente montre que la nature peut parfois rétablir seule son équilibre : en 2010, le passage du cyclone Oli avait nettoyé récifs, algues et taramea, permettant une régénération spectaculaire. Mais la multiplication des pressions environnementales change la donne. Aujourd’hui, la survie des coraux dépend d’une gestion raisonnée, mêlant science, prévention et préservation, afin de protéger un patrimoine marin qui constitue une richesse écologique et économique essentielle pour la Polynésie française et, au-delà, pour toute la France.

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